L’économie de fonctionnalité, modèle économique préférentiel de l’économie circulaire


Passer de la vente à la fourniture en vue d’assurer une performance globale


Le principe de base de l’économie de fonctionnalité est très simple puisqu’il s’agit de transiter du modèle économique « traditionnel » basé sur la vente de volume de biens ou de services vers la fourniture d’un usage. De manière schématique, les producteurs restent propriétaires des produits qu’ils mettent à disposition, et fournissent à leurs clients une solution intégrée permettant d’assurer une performance optimale, tout au long du cycle de vie des produits. La recherche d’une performance globale, sur les plans économique, social, et environnemental, distingue également l’économie de fonctionnalité d’une offre de location classique. L’entretien, la réparation, l’efficacité matière et énergétique, font ainsi partie des services complémentaires susceptibles d’être intégrés dans l’offre d’usage.


Le concept d’économie de fonctionnalité date des années 1980 et n’était initialement pas relié à des problématiques d’ordre environnemental. Ses premiers théoriciens y voyaient ainsi davantage un axe de compétitivité pour les entreprises (économie des coûts de matières premières, valorisation du capital humain et immatériel des entreprises, élargissement et fidélisation de la clientèle, etc.) et de préservation de l’emploi. Les bénéfices environnementaux liés à sa mise en œuvre ont été démontrés par la suite. En restant propriétaire, les producteurs ont tout intérêt à favoriser l’allongement de la durée de vie de leurs produits et à les rendre plus efficients. L’économie de fonctionnalité représente ainsi une solution réelle à la problématique de l’obsolescence programmée.


Plusieurs entreprises pionnières ont historiquement déployé un modèle d’économie de la fonctionnalité, parmi lesquelles les fabricants de pneumatiques Michelin (vente de kms en lieu et place de pneus) ou d’imprimantes Xerox (vente de copies en lieu et place d’imprimantes). De plus en plus d’entreprises travaillent aujourd’hui à ce changement de modèle, poussées en cela par l’augmentation du coût des matières premières et la remise en cause des business models traditionnels du fait de l’uberisation de l’économie.


Figure 1 : Les pneumatiques, un exemple de produit intégré dans l'économie de fonctionnalité


Accélérer la transition vers l’économie de fonctionnalité au sein de la Métropole du Grand Paris


L’économie de fonctionnalité peut être porteuse de valeur ajoutée territoriale car elle contribue à massifier certaines activités et emplois non-délocalisables (entretien, réparation, etc.), tout en améliorant le bilan environnemental du territoire (réduction de la consommation de ressources, et des émissions de déchets et de polluants vers la nature). La transition de modèle économique peut toutefois être complexe et représenter une prise de risque trop importante pour les entreprises engagées dans un marché « linéaire » concurrentiel. Les acteurs publics ont alors un rôle d’accompagnement à jouer pour inciter les acteurs économiques à être innovants. Plusieurs expérimentations d’accompagnement à la transition vers l’économie de fonctionnalité ont d’ores et déjà été mises en œuvre dans les territoires, et un vrai savoir-faire français s’est donc constitué dans ce domaine.
Les collectivités territoriales peuvent également promouvoir ce modèle économique via leurs marchés publics, et par le biais des services qu’elles fournissent à leurs administrés. La multiplication des tiers-lieux et services innovants tels que les fab labs, espaces de co-working ou bibliothèques d’objets partagés contribue ainsi à diffuser les principes de l’économie de fonctionnalité auprès des citoyens. L’évolution des modes de consommation est également perceptible à travers l’émergence d’autres modèles économiques innovants et relativement proches tels que l’économie collaborative et du partage.
Pour aller encore plus loin, des études prospectives (INEC, 2015 ; ADEME, 2017) permettent de projeter l’application d’une économie d’usage centrée sur la performance à plus large échelle, sur l’ensemble des grands domaines de la consommation.


Figure 2 : Les services de vélo-partage, un exemple d'offre ancrée dans l'économie de fonctionnalité

Lever les freins économiques, sociétaux et environnementaux au changement de modèle
 

Les modalités de financement de l’économie de fonctionnalité divergent de ceux de l’économie classique. Mettre en œuvre un modèle économique orienté sur la fourniture d’usage requiert généralement des investissements initiaux conséquents (constitution du stock de fournitures) alors que les revenus attendus sont davantage lissés dans le temps. Les voies de financement classiques, basées sur des retours sur investissement rapides, peuvent être bloquantes au regard de ces caractéristiques. De nouvelles solutions innovantes telles que le financement participatif doivent être mobilisées en vue d’accélérer le déploiement de l’économie de fonctionnalité.
L’habitude des consommateurs, et notamment leur attachement à la propriété, constitue un second frein à lever en vue d’accélérer le passage à l’échelle de ce modèle économique innovant. Bien que des évolutions positives se fassent sentir sur ce point dans les récentes enquêtes d’opinion, les bénéfices environnementaux liés à l’économie de fonctionnalité peuvent être remis en cause du fait d’une mauvaise utilisation ou d’un mauvais entretien par les usagers. La robustesse des biens fournis, ainsi que l’évolution comportementale des consommateurs, constituent donc des facteurs centraux pour concrétiser les bénéfices environnementaux liés à l’économie de fonctionnalité. Un point de vigilance doit enfin être porté sur l’effet rebond, susceptible de compenser les gains d’efficience par une surconsommation de l’usage proposé.

 


Autres priorités


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